De retour du Synthfest France 2025

Publié le 16 avril 2025 à 21:44

En une dizaine d’années, le Synthfest France est devenu un évènement incontournable pour tous les passionnés de musique électronique. Et cette année encore une foultitude d’exposants, d’artistes, de collectionneurs et d’inventeurs géniaux se sont retrouvés pour trois jours à Orvault, près de Nantes.

Comme il est de coutume, l’ambiance chaleureuse et bienveillante était au rendez-vous, que ce soit autour des stands, au bar ou à proximité des légendaires foodtrucks. Il est évidemment impossible de faire un retour exhaustif mais ces trois jours ont été l’occasion de tester des modules fort intéressants, de découvrir des synthés, de revoir les copains et de faire de belles rencontres.

 

C’est d’ailleurs l’une des grandes force de cet évènement capable de rassembler tous les styles de musique, tous les matériels et tous les niveaux où on peut tranquillement discuter avec des concepteurs et des artistes, profiter des ateliers et des démonstrations, jouer sur des instruments mythiques mis à disposition par des collectionneurs passionnés.

Les Incontournables

Frédéric Rible - Heritage Modular v2

Parmi les pépites de cette année, difficile de ne pas citer la version 2 du Héritage Modular, chef-d’œuvre conçu de A à Z par le génial Frédéric Rible. J’avais eu la chance de pouvoir découvrir la première version il y a deux ans et cette évolution tient largement ses promesses.
Un synthé compact, multitimbral, compatible MPE, pensé dans les moindres détails, aussi élégant qu’efficace. Les menus contextuels et la logique de navigation entre les modules font de cette machine une vraie réussite, déjà adoptée par des artistes comme Seb Zack sur son morceau Héritage, intégralement enregistré sur ce synthé, ou Kurtz Mindfields

 

Kurtz Mindfield - SyntR R10

C’est d’ailleurs avec la formidable équipe qui gravite autour du projet Kurtz Mindfields que j’ai commencé mon Synthfest en rencontrant Jean-Luc Briançon qui s’amusait sur le nouveau R10 de chez SynthR la dernière création issue des recherches de Remy Wasselin et Jean-Luc Lartigue.

C’est un superbe hybride analogique/numérique, pensé pour la performance. Ergonomique, musical, puissant, totalement aligné avec l’univers sonore de Kurtz Mindfields. Une très belle réussite qui devrait prochainement être commercialisée.

 

Juste à coté, Stephen Ingrand, de chez NRSynth, présentait un magnifique clone analogique modernisé du Moog Model 15, piloté en MIDI. Le son est tout bonnement hallucinant, ça sonne gras, chaud, organique...

Stephen Ingrand - NR Synth

 

Le genre de machine qui donne envie de s’asseoir devant pendant des heures pour jouer avec. Le confort de ces modules imposants avec des potards précis est évidemment sans commune mesure avec les trimmers de mon eurorack.

 

A propos des synthés incontournables qui était présents, je n’ai malheureusement pas eu le temps d’aller voir Laurent (Baloran) et son incroyable The Pool cette année. Il présentait pourtant une nouveauté qui a fait beaucoup parler dans les allées, le BumbleBee, un instrument hybride piloté par un capteur de mouvement. Tant pis, ça sera pour l'an prochain !

 

O.Grall et O.Delevingne sur les synthés RSF

 

Un autre grand moment traditionnel du SFF dans la catégorie "DIY de génie", c’est la visite du stand de l’excellent Thierry Rochebois qui, cette année, présentait un Yamaha Reface Wavetable… qui n’existe pas.

Qu’à cela ne tienne, Thierry l’a construit lui-même à partir d’un clavier pour enfants (le Remie E30 de Yamaha, qui a le même clavier que le Reface). Il a remplacé l’électronique, codé son moteur audio et même ajouté une alimentation sur batterie par USB.

Le tout customisé à base de papier brillant et coloré, de petites figurines et de post-it pour indiquer les fonctions des touches. Résultat : un son surprenant sans aucun rapport avec l’aspect de l’appareil et une touche esthétique inimitable.

Custom Reface Wavetable - T.Rochebois

 

 

 

 

Dans la grande salle d'expo, on pouvait aussi admirer l’étrange et fascinant Méta Instrument de Puce Muse, sorte d’exosquelette imprimé en 3D, truffé de capteurs pour contrôler des synthétiseurs et des générateurs d’images en temps réel. Regarder son opérateur l’utiliser est une véritable folie visuelle et sonore.

Puce Muse - Méta Instrument 4

 

 

Et il y avait aussi le célèbre Loumavox qui avait tant fait parler de lui il y a quelques années. C'est peut-être un fake, mais c'est une bien belle machine !

Le fameux Loumavox

 

Découvertes Eurorack

Sur le terrain de l’Eurorack, plusieurs modules  m’ont tapé dans l’œil.

 

Pour commencer, le Zazou de chez Kaona, un générateur CV/Gate à 4 canaux, qui m’a séduit instantanément par son équilibre entre simplicité et puissance.

Mention spéciale à son binôme, le Skippy, séquenceur malin et parfaitement intégré.

J’ai été convaincu après la démo efficace de Gilles, le créateur inspiré et inspirant et le Zazou a déjà rejoint mon setup.

Je vous en reparlerai prochainement.

 

Chez Larix Elektro, un prototype de VCO baptisé Origami propose une idée originale : faire passer seule une onde triangulaire générée par un 3340 dans des étages de repli (entre 2 et 7 fois) puis les mixer pour obtenir un son dont on peut précisément régler la richesse harmonique.
Le prototype est encore en cours de développement et le Synthfest France a été l’occasion pour le concepteur d'avoir des retours de modularistes sur le concept.
A suivre mais c’est déjà super prometteur. 

 

A la toute fin du SFF et sur un conseil éclairé de Hugo Paris, j'ai eu quelques minutes pour essayer un module de chez Eowave qui ne semble pas encore disponible mais qui m’a fortement impressionné : le Redondance.

Il était disponible dans un rack sur le stand Modularsquare.

Apparement il s’agit d’un prototype de quadruple delay qui avait été annoncé lors du Superbooth en 2021 mais qui n’est malheureusement pas encore commercialisé.
J’ai beaucoup aimé son ergonomie directe et, surtout, les sons bien expérimentaux typiques des modules Eowave. A surveiller si jamais ça arrive un jour en boutique.

Dans la catégorie "objet sonore non identifié", le stand de Synthfood avait de son côté apporté un modulaire entièrement composé de pièces recyclées : capuchon de stylos, boutons de gazinière, câbles improbables aux standards douteux équipé, entre autre, d’un module baptisé Seagull Cry simulant les cris de mouettes. Inutile ? Peut-être. Génial ? Clairement.

Passage par la Canopée

 

Dans le second espace d’exposition, la Canopée, j’ai bien entendu passé du temps avec Marcel, l’impressionnant modulaire Eurorack 100 % Make Noise de Pierre, alias Bas les Patchs. Une superbe machine, pensée dans ses moindres détails et maîtrisée à la perfection par un modulariste exigeant et enthousiaste.

Marcel

 

 

Non loin de là, j’ai aussi beaucoup aimé le projet de Halftime Modular qui proposera prochainement un enregistreur 8 pistes sur carte SD archi-simple : 8 entrées mono, 1 bouton d’enregistrement.

Le tout sur 4 HP (le proto en photo est plus large), sans fioritures. Idéal pour archiver les sessions sans se poser de questions car on pourra ensuite envoyer les 8 pistes (au format .wav) directement dans un DAW pour être exploitées. Une idée simple, mais géniale pour simplifier un workflow et enregistrer les sessions à la volée.

Aux côtés du désormais célèbre Marcel, un véritable orchestre de machines mythiques étaient accessibles grace aux collectionneurs venus avec leurs plus belles pièces : les incontournables machines Roland (707, 808, 909…), des raretés comme les boites à rythmes Lollipop, l’ARP2600 de Michel Geiss, des EMS Synthi, une véritable Space Echo, le GRP A4 de Laurent Pelletier, le superbe MosLab de Yves Usson qui a passé un temps infini à faire découvrir les principes de la synthèse additive à tous les visiteurs et, bien entendu, les RSF d’Olivier Grall, qui a nous a offert un moment magique lors d’une jam improvisée avec Benoît Widemann (ex-Magma).

Les masterclasses

Le SFF, ce sont aussi les masterclasses et les ateliers.

Douze masterclasses, dix ateliers et initiations au divers logiciels audios, plus de trente démonstrations, réparties sur les trois jours, et un casse-tête pour tout suivre tant le programme est dense.

Concernant les masterclasses, j’ai particulièrement apprécié celle de Knarf (Les Sondiers) sur les difficultés intrinsèques au studio hybride, celle, très technique, d’Ivan Cohen sur le développement de plugins audio, et l'inspirante session d’Adrien Périnot autour de la création de musique ambient.

 

 

 

Sans oublier, évidemment, Charlotte Dubois et sa brillante initiation au thérémin, un instrument à la fois hypnotisant et infernal à maîtriser.

Ca se voit que je galère là, non ? -
Merci Charlotte pour la photo :)

 

Pendant ce temps, les démonstrations s’enchaînaient sur la grande scène et les ateliers installés sous le chapiteau extérieur affichaient complet, notamment ceux consacrés à la découverte du modulaire Eurorack proposés par la boutique spécialisée Modularsquare.

Christian Foucault - PhModular

 

Plus qu’un simple festival…

Trois jours, c’est bien court pour tout voir, tout essayer et prendre du temps sur des machines parfois complexes à apprivoiser tout en profitant des concerts et des démos dans la salle de l’Odyssée. J’ai quand même pu assister à celle du superbe Manatee par Fred’s Lab et à la performance de Jean-Luc Briançon qui présentait son nouvel album Flying Again réalisé en collaboration avec Stephen Ingrand (NRSynth) et Stéphane Moumon (MosLab).

 

JL Briançon et S.Ingrand

 

Des machines, de la technologie, des innovations… ce n’est pas ce qui manque au Synthfest. Mais ce que je retiens avant tout de cette édition, c’est l’esprit communautaire. Le plaisir de croiser les copains, de faire des rencontres enrichissantes, de discuter avec des concepteurs brillants, des musiciens passionnés, des électroniciens fous, des bidouilleurs géniaux — parfois tout ça à la fois comme les fameux slasheurs d'Olivier Delevingne.

 

On parle de sons, de technique, de patchs, de circuits, de design... et le temps passe vite, trop vite. Chaque rencontre ouvre une nouvelle porte, chaque conversation donne envie d’essayer autre chose. C’est ça, la magie du SynthFest.


Il suffit de jeter un œil au programme officiel pour comprendre qu’il est physiquement impossible de ne rien rater et qu’il faut faire des choix parfois difficiles d’autant que le temps passe vite quand on se retrouve à discuter sur un stand ou autour d’une bière et que chacun y va de son « j’ai vu un truc, c’est dingue, faut que t’aille voir… ».

 

Et si tout cela est possible, c’est grâce à l’équipe incroyable qui organise l’événement. L’investissement des membres du staff, leur bienveillance et leur exigence rendent ce rassemblement unique. Un immense bravo à eux.

 

 

Vivement 2026 pour la prochaine édition !

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Commentaires

pelletier
il y a 12 jours

Merci pour ton article et tes gentils mots, qui me touchent beaucoup. Tu as compris ce qu'on essayait de faire en termes d'état d'esprit et de partage. Nous sommes des passionnés au milieu de passionnés. J'espère que tu seras des nôtres en 2026!